La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

En ce mois de septembre 2019, l’actualité internationale en matière de promotion de l’intégrité publique et de prévention de la corruption est dense. A commencer par le débat autour de la lutte contre les conflits d’intérêts au sein des institutions européennes. Alors que 27 commissaires européens viennent d’être nommés, le parcours de certains d’entre eux semble déjà semé d’embuches. La mise en place d’un organe indépendant dédié au respect des règles éthiques pour toutes les institutions européennes, comme souhaité par la nouvelle Présidente de la commission européenne Mme Ursula von der Leyen, s’avère indispensable.

En outre, le Président des Etats-Unis est visé par une procédure de destitution, accusé d’avoir fait pression sur le président ukrainien pour ouvrir une enquête sur le fils de son rival démocrate, Joe Biden. Enfin, la Jordanie et la Somalie viennent d’adopter des lois anticorruption. L’enjeu est désormais d’assurer leur mise en œuvre effective et l’indépendance des nouvelles commissions créées. C’est d’ailleurs la crainte des citoyens indonésiens qui ont récemment protesté contre le risque d’atteinte à l’indépendance du KPK, leur agence anticorruption.

ORGANISATIONS INTERNATIONALES

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

Le 10 septembre 2019, la nouvelle présidente de la Commission européenne, Mme Ursula von der Leyen, a proposé la nomination des commissaires qui devraient constituer son équipe de travail et entrer en fonction le 1er novembre 2019. Si le Parlement européen la confirme à son poste, la Tchèque Vera Jourova devrait servir en tant que commissaire aux valeurs et à la transparence. Dans sa lettre de mission, Mme von der Leyen demande notamment à la nouvelle commissaire de reprendre les négociations avec le Parlement européen et le Conseil des ministres sur la réforme du registre de transparence pour apporter plus de visibilité au processus législatif européen. Elle souhaite que les obligations des institutions européennes dans ce domaine aillent plus loin que la pratique actuelle. La présidente a également demandé à la commissaire de mettre en place un organe indépendant dédié au respect des règles éthiques pour toutes les institutions européennes.

A partir du 30 septembre s’ouvrent à Bruxelles les auditions pour les candidats au poste de commissaire européen. Durant 10 jours, les députés européens chercheront à détecter d’éventuels conflits d’intérêts et examineront les déclarations de revenus et de patrimoine des futurs commissaires. (Le Monde, 23 septembre 2019)

La commission des Affaires juridiques (Juri) du Parlement, chargée de passer au crible les déclarations d’intérêts financiers des candidats avant leur audition, a cependant déjà estimé que la Roumaine, Rovana Plumb, nommée aux Transports, et le Hongrois, Laszlo Trocsanyi, nommé à l’Elargissement, étaient en situation de conflit d’intérêts globale. C’est-à-dire, incompatible avec l’appartenance même au collège des commissaires européens, peu importe leur portefeuille. Cette décision couperet avant leur audition est une première, à tel point que le président du Parlement européen hésite sur les suites à donner. (Contexte, 27 septembre 2019 ; The Guardian, 26 septembre 2019)

Les débats autour de la lutte contre les conflits d’intérêts au Parlement européen battent également leur plein en ce mois de septembre. Selon les derniers chiffres de Transparency International Europe, un tiers des 751 députés élus en mai ont des activités rémunérées en dehors de leur mandat. Certaines de ces activités peuvent constituer des situations de conflits d’intérêts mais la règlementation européenne n’a pas été pensée pour combattre ce type de dérives, selon l’ONG. Si des sanctions sont prévues, elles sont inexistantes dans la pratique. (Le Monde, 26 septembre 2019)

Quant aux commissaires sortants, Médiapart relève le cas de l’Allemand Günther Oettinger, en charge du budget dans l’exécutif européen, et qui a déposé les statuts de sa future société de relations publiques au registre du commerce de Hambourg. Jean-Claude Juncker a sollicité l’avis du comité éthique de la Commission européenne. (Médiapart, 17 septembre 2019).

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

Dans un rapport d’évaluation publié le 4 septembre 2019, le groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe appelle le Danemark à renforcer ses politiques de prévention de la corruption à l’égard des membres du gouvernement et de la police. Le rapport demande qu’une attention particulière soit accordée aux règles relatives à la manière dont les personnes occupant des postes de direction s’engagent auprès des lobbyistes, ainsi qu’à leur emploi après leur cessation de service dans le secteur public (pantouflage). Le GRECO se félicite cependant du renforcement des procédures d’achat de la police en 2018, du contenu des nouvelles lignes directrices « Bonne conduite dans la police et le parquet » et des modifications apportées aux procédures d’habilitation de sécurité, et souligne la création de l’Autorité indépendante de plainte contre la police en 2012.

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

La 19ème conférence internationale anti-corruption organisée par Transparency International se tiendra à Séoul en Corée du 2 au 5 juin 2020. Le thème de la conférence a été dévoilé et portera sur la vérité, la confiance et la transparence pour 2030. Un appel à propositions de sessions sera ouvert à partir du 1er octobre.

ZONES GÉOGRAPHIQUES

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

ALLEMAGNE

Le 4 septembre 2019, s’est ouvert en Allemagne le procès pénal de l’affaire de fraude fiscale aux dividendes, dite des « CumEx ». Deux anciens banquiers britanniques sont jugés pour avoir mis en place un montage fiscal qui permettait aux propriétaires d’actions boursières de contourner la taxe sur les dividendes. Répandue à travers l’Europe, cette escroquerie aura coûté 7,2 milliards d’euros à l’Allemagne, où ces  manœuvres ont été rendues impossibles en 2012 par un changement législatif, contre 1,7 milliard au Danemark et 201 millions d’euros à la Belgique, selon une enquête conduite fin 2018 par 19 médias européens. (La Tribune, 4 septembre 2019 ; The Guardian, 4 septembre 2019)

ROYAUME-UNI

Alors que le Royaume-Uni s’enlise dans une issue incertaine face au Brexit, le premier ministre Boris Johnson se retrouve une fois de plus dans l’embarras. Il aurait omis de déclarer, alors qu’il était maire de Londres, de possibles conflits d’intérêts avec son amie, le mannequin américain Jennifer Arcuri, devenue entrepreneur. Selon les informations du Sunday Times, Boris Johnson aurait octroyé aux entreprises de Jennifer Arcuri plusieurs subventions à hauteur de dizaines de milliers de livres sans jamais déclarer de potentiels conflits d’intérêts. (7sur7, 24 septembre 2019 ; The Times, 24 septembre 2019)

RUSSIE

En Russie, les élections locales du 8 septembre ont mis en difficulté le parti de Vladimir Poutine, Russie unie, dans la capitale. Alexeï Navalny, principal opposant, est considéré comme le responsable de ce revers électoral. Après l’interdiction des candidats indépendants, il avait appelé à voter pour les candidats les plus à même de battre les représentants du pouvoir. Une stratégie couronnée de succès à Moscou, où les candidats du Kremlin ont été défaits dans 20 des 45 circonscriptions. Ailleurs, le pouvoir l’a emporté dans la plupart des 6 000 scrutins locaux, mais la situation reste tendue et incertaine à Saint-Pétersbourg, où les résultats n’ont toujours pas été communiqués. Après les nombreux rassemblements contre le pouvoir cet été, sept manifestants ont été condamnés à des peines de prison ferme. (Le Monde, 17 septembre 2019 ; Le Monde diplomatique, septembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

TUNISIE

L’ancien président de la Tunisie, Zine El Abidine Ben Ali, est mort le 19 septembre en Arabie Saoudite où il vivait en exil depuis la révolution de 2011. Après plus de deux décennies d’un pouvoir répressif, Ben Ali avait été renversé en 2011 par un mouvement populaire, point de départ d’un vague de révoltes dans la région connue sous le nom du « Printemps arabes ». L’ère Ben Ali aura été marquée par une corruption massive, le clan Ben Ali accaparant les richesses du pays en toute impunité. Près de cinq milliards d’euros ont été détournés, environ le quart des bénéfices du secteur privé, selon la Banque Mondiale. (Le Point, 19 septembre 2019 ; BBC news, 19 septembre 2019)

Toujours en Tunisie, le premier tour des élections présidentielles qui a eu lieu le 15 septembre a généré une onde de choc en éliminant les candidats des partis politiques traditionnels. Deux outsiders, Kaïs Saïed, professeur de droit constitutionnel, et Nabil Karoui, magnat de la communication et actuellement emprisonné pour des soupçons de fraude fiscale, s’opposeront le 6 octobre au deuxième tour. (La Croix, 22 septembre 2019)

JORDANIE

En Jordanie, une nouvelle loi anti-corruption interdit désormais aux responsables publics en fonction de détenir des intérêts dans des entreprises privées sous contrat avec l’Etat. Depuis la loi, un membre du Parlement a dû démissionner. Les critiques s’inquiètent pourtant de la mise en œuvre de la loi et du fait que beaucoup de responsables publics la contournent en plaçant leurs intérêts au nom de membres de leur famille. (Al Jazeera, 5 septembre 2019)

IRAK

En Irak, la commission pour l’intégrité, le gendarme anticorruption irakien, a annoncé que plus d’un milliards de dollars étaient retournés dans les coffres de l’Etat grâce à une vaste opération. D’autres actions sont en cours et onze anciens ministres sont visés par des mandats d’arrêt. De nombreux scandales dans le domaine de la reconstruction ou du pétrole éclaboussent cependant régulièrement le pays. (Le Figaro, 6 septembre 2019)

ISRAËL

En Israël, le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son rival Benny Gantz sont arrivés presque exæquo lors des législatives du 17 septembre et tentent de former un gouvernement. Avec l’appui de leurs alliés, MM. Netanyahu et Gantz obtiennent respectivement 55 et 54 sièges, un score dans les deux cas inférieur au seuil des 61 pour obtenir la majorité. M. Netanyahu doit être auditionné en parallèle par le procureur général pour « corruption », « abus de confiance » et « malversations » dans des affaires qui impliqueraient notamment des avantages fiscaux accordés à un homme d’affaires en échange d’une couverture favorable de son média. (Le Point, 24 septembre 2019 ; NPR, 25 septembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Septembre 2019

ZIMBABWE

L’ancien président du Zimbabwe, Robert Mugabe, est mort le 6 septembre à Singapour. Héros de l’indépendance, Robert Mugabe avait dirigé le pays pendant 37 ans. Il laisse un pays en lutte avec la corruption généralisée et des dysfonctionnements systémiques. (Franceinfo, 6 septembre 2019 ; The Guardian, 6 septembre 2019)

MOZAMBIQUE

Le pape François, en visite au Mozambique, a dénoncé les dirigeants corrompus et l’impact désastreux sur la population dont une partie importante vit en dessous du seuil de pauvreté. (Le Point, 6 septembre 2019 ; Reuters, 6 septembre 2019)

SOMALIE

En Somalie, le président Mohamed Abdullahi Mohamed a promulgué une loi contre la corruption qui permettra la création de commissions anti-corruption indépendantes, an niveau fédéral et régional, selon un communiqué de la présidence. (Africanews, 21 septembre 2019 ; Africanews.com, 21 septembre 2019)

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INDONESIE

En Indonésie, le Parlement a adopté une loi qui risque d’affaiblir l’agence de lutte contre la corruption (KPK). De nombreuses manifestations ont eu lieu à Jakarta pour protester contre le risque d’atteinte à l’indépendance du KPK. Le président indonésien qui s’apprête à être investi pour un second mandat en octobre, envisage de réviser cette loi. (Le Figaro, 24 septembre 2019 ; The Washington Post, 24 septembre 2019)

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ETATS-UNIS

Aux Etats-Unis, les démocrates lancent une procédure de destitution du Président Donald Trump. Il est accusé d’avoir fait pression sur Vladymyr Zelensky, président de l’Ukraine, pour ouvrir une enquête sur le fils de son rival démocrate, Joe Biden, qui était membre de 2014 à 2019 du conseil d’administration d’un groupe ukrainien gazier accusé de corruption. (Le Point, 25 septembre 2019 ; The New York Times, 25 septembre 2019)

En attendant, la campagne des primaires présidentielles du parti démocrate américain se poursuit. La candidate, Elizabeth Warren, sort son épingle du jeu en annonçant la lutte contre la corruption et  l’influence des lobbys sur les politiques publiques comme des enjeux majeurs pour le pays. Mme Warren avait notamment introduit en 2018 au Congrès américain la loi anticorruption et intégrité publique qui proposait, entre autre, d’interdire à vie toute activité de lobbying pour les législateurs et la création d’un bureau d’intégrité publique. Le Congrès avait finalement adopté une version amoindrie de cette loi. (The New Yorker, 17 septembre 2019 ; Medium, 16 septembre 2019)

Toujours aux Etats-Unis, le lanceur d’alertes, Edward Snowden, ancien sous-traitant de l’Agence nationale de sécurité (NSA), fait l’objet de poursuite de la justice américaine suite à la publication de ses mémoires. Il lui est reproché d’avoir publié son livre sans avoir soumis son manuscrit à ses anciens employeurs, la CIA et la NSA, et d’avoir ainsi violé les clauses de confidentialité de ses contrats de travail. Une plainte qui vient s’ajouter aux charges qui pèsent sur lui pour espionnage, vol et utilisation illégale de biens gouvernementaux. Snowden avait révélé en juin 2013 l’ampleur de la surveillance mise en place par le puissant service de renseignement. Il est depuis bloqué en Russie qui lui avait offert l’asile. (Libération, 18 septembre 2019 ; The Guardian, 23 Septembre 2019)

AMERIQUE LATINE & CARAÏBES

Transparency International publie son baromètre de la corruption pour l’Amérique latine et les Caraïbes, le résultat d’une enquête auprès de 17 000 citoyens de 18 pays à propos de leur expérience et perception de la corruption. Plus d’une personne sur cinq dans cette partie du monde a dû payer des pots de vin pour accéder à un service public, tel que l’eau ou l’électricité. De même, une personne sur quatre reçoit des pots-de-vin en échange de votes, ce qui souligne un manque d’intégrité publique de la part des gouvernements de la région.

GUATEMALA

Au Guatemala, la mission de la Commission internationale contre l’impunité, CICIG, rattachée à l’Organisation des Nations Unies, a pris fin le 3 septembre après que le président Jimmy Morales l’eut déclarée indésirable malgré d’indéniables succès dans la lutte contre l’impunité. (La Croix, 5 septembre 2019 ; Al Jazeera, 3 septembre 2019)

SALVADOR

Au Salvador, pourtant, le président Nayib Bukele, élu en février, vient de lancer dans son pays une Commission internationale contre l’impunité sur le modèle de la CICIG au Guatemala. L’annonce suscite une vague de critiques des partis traditionnels salvadoriens mais est soutenue par la population. (Le Monde, 8 septembre 2019)

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