La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Le contexte international du mois de mars est marqué par la pandémie de Covid-19 qui affecte la planète. Cette crise sanitaire mondiale qui nécessite des décisions inédites des Etats et institutions internationales nous rappelle l’importance de la transparence dans le processus décisionnel pour assurer la confiance des citoyens dans leurs gouvernements. Elle pose également la question de savoir comment concilier la lutte contre le virus et le respect des valeurs démocratiques. En Hongrie, par exemple, le Premier ministre, Viktor Orban, s’est attribué les pleins pouvoirs pour un temps indéfini.

Par ailleurs, de nombreuses enquêtes et décisions de justice contre de hauts responsables publics suspectés de corruption et de détournements de fonds publics font également l’actualité du mois de mars. En Slovaquie, par exemple, 13 magistrats, dont la présidente par intérim de la Cour suprême, ont été arrêtés pour corruption et déférés devant la Cour constitutionnelle, envoyant un signal fort suite à la victoire du parti anti-corruption aux élections législatives  de février dernier. Pour des raisons sans doute moins louables, les autorités saoudiennes ont également arrêté, sur ordre du prince héritier Mohammed Ben Salman, quatre princes de la famille royale ainsi que de nombreuses personnalités influentes, accusés de corruption et de complot contre le pouvoir en place.

ORGANISATIONS INTERNATIONALES

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Lors d’un sommet virtuel du G20 le 26 mars et face à la pandémie du coronavirus, les 20 plus grandes économies de la planète ont appelé dans leur communiqué final à la solidarité, à la transparence et à la coopération avec les institutions internationales pour « rétablir la confiance, préserver la stabilité financière et ranimer la croissance ». Les pays membres ont annoncé par ailleurs leur intention d’injecter plus de 5 000 milliards de dollars dans l’économie mondiale pour contrer les répercussions sociales, économiques et financières de la pandémie. (L’Obs, 26 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

La pénurie de respirateurs, masques et autres tests médicaux a créé une situation inédite de concurrence entre les pays et, au sein même des Etats, entre les acheteurs publics, ce qui aggrave la crise sanitaire. Il n’est plus question d’appels d’offres transparents et, partout sur la planète, l’heure est à la négociation directe, qui s’accompagne souvent d’un cortège prévisible de favoritisme, malversations, et surfacturations, porteurs de futurs contentieux. Ce constat a été dressé lors d’un colloque en ligne, « Public Contracts and the Covid-19 Coronavirus », qui a réuni le 23 mars des spécialistes de la commande publique de plusieurs pays. (Le Monde, 30 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Espagne

Les révélations en cascade sur la fortune secrète détenue par Juan Carlos en Suisse ont obligé son fils, le roi Felipe VI, à réagir. Pour mettre fin au scandale et protéger l’institution monarchique, l’actuel roi d’Espagne a décidé de couper les liens avec son père. Dans un communiqué, publié dimanche 15 mars  par la Maison royale, Felipe VI renonce à l’héritage de l’ancien monarque, âgé de 82 ans, et retire en outre au roi « émérite » les fonds qui lui sont d’ordinaire alloués dans le cadre du budget de la famille royale, s’élevant à près de 195 000 euros par an. (Le Monde, 16 mars 2020 ; CNN, 17 mars 2020)

Hongrie

En pleine de période de coronavirus, Viktor Orban s’attribue les plein pouvoirs. Le Premier ministre hongrois a fait voter une loi permettant au gouvernement de légiférer sur tous les sujets par décret, de suspendre les élections et de déroger à n’importe quelle loi pour une période indéfinie. La loi prévoit aussi des peines de cinq ans de prison pour diffusion de fausses nouvelles sur le virus ou les mesures du gouvernement. En dix ans de pouvoir, l’homme fort de Budapest a multiplié les atteintes à l’Etat de droit dans le domaine de la justice, de la société civile et de la liberté de la presse. (Libération, 31 mars 2020 ; Foreign Policy, 31 mars 2020)

Russie

La filiale russe du distributeur français Auchan est secouée par un scandale de corruption. Me Alexeï Jarkov, expert anti-corruption en charge de l’enquête, a pointé du doigt des mécanismes de corruption via des appels d’offres pipés, des hausses artificielles de prix, des faveurs pour la promotion de produits et d’autres irrégularités au service qualité et au contrôle financier, qui expliqueraient de lourdes pertes financières pour le groupe en Russie (14 millions d’euros de perte en 2019). Chargé de suivre le dossier, Me Jarkov a finalement été écarté après avoir été victime d’une attaque. (L’opinion, 06 mars 2020).

Slovaquie

Après la victoire du parti anti-corruption OLaNO aux élections législatives du 29 février, de nombreux juges, dont l’actuelle présidente par intérim de la Cour suprême, et une ancienne secrétaire d’Etat à la justice, ont été arrêtés le 12 mars. Ils sont accusés de « corruption, interférences avec l’indépendance des tribunaux et obstruction à la justice » et ont été déférés devant la Cour constitutionnelle. Une telle vague d’arrestation au plus haut niveau du système judiciaire est inédite dans l’histoire de la Slovaquie démocratique. A des degrés divers, tous ces magistrats ont été mis en cause ces derniers mois dans les médias locaux, pour les liens avec Marian Kocner, un puissant mafieux qui est notamment accusé d’avoir commandité l’assassinat d’un journaliste d’investigation, Jan Kuciak, en février 2018. Arrêté et mis en accusation pour meurtre, M. Kocner est désormais en plein procès. (Le Monde, 12 mars 2020 ; OCCRP, 12 mars 2020)

Suède

La banque suédoise Swedbank, dans le collimateur des autorités financières pour des soupçons de blanchiment, a vu transiter entre 2014 et 2019 quelques 37 milliards d’euros à travers les comptes de clients « à haut risque » dans les pays Baltes, selon un rapport indépendant commandé par la banque. La banque a reçu une amende de plus de 350 millions d’euros et fait désormais face à des poursuites aux Etats-Unis. (Le Figaro, 23 mars 2020 ; The Financial Times, 23 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Algérie

La cour d’appel d’Alger a condamné deux ex-premiers ministres de l’ère Bouteflika, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, respectivement à quinze et douze ans de prison ferme, à l’issue d’un procès sans précédent pour corruption. La cour d’appel a confirmé, mercredi 25 mars, les sentences prononcées le 10 décembre 2019 contre ces proches de M. Bouteflika. (Le Monde, 25 mars 2020 ; AllAfrica, 25 mars 2020)

Arabie Saoudite

Des hauts gradés de l’armée, des personnalités influentes, des juges ainsi que quatre membres de la dynastie royale saoudienne ont été arrêtés dans une purge menée par le prince héritier Mohammed Ben Salman. Les autorités saoudiennes ont annoncé avoir diligenté une vaste enquête ciblant des centaines de personnes accusées de délits allant de la corruption financière, du trafic d’influence aux graves infractions administratives. Cette nouvelle purge au sein de la famille royale parait destinée à faciliter la montée de Mohammed Ben Salman sur le trône de Riyad, en mettant hors d’état de nuire de possibles gêneurs. (Le Point, 11 mars 2020 ; The New York Times, 6 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Afrique du Sud

Le Président Ramaphosa a été blanchi par la justice au sujet d’un don électoral de 27 000 euros de la part d’un groupe industriel. M. Ramaphosa était accusé par la médiatrice de la République chargée de la lutte contre la corruption d’avoir menti sur l’origine d’une partie du financement de sa campagne de 2017 pour la présidence du Congrès national africain (ANC). (Agence Afrique, 11 mars 2020 ; OCCRP, 11 mars 2020)

Congo (RDC)

En République démocratique du Congo (RDC), l’ancien ministre de la Santé Oly Ilunga Kalenga et son  conseiller financier Ezechiel Mbuyi Mwasa ont été condamnés le 23 mars à cinq ans de travaux forcés pour le détournement de plus de 400 000 dollars. Cet argent était destiné à la riposte contre le virus Ebola dans la partie Est du pays. La Cour de cassation a condamné les accusés à cinq ans de « travaux forcés » et à la privation de leurs droits civiques. Les travaux forcés n’étant pas appliqués formellement dans le pays, l’ex-ministre et son conseiller devront purger cette peine en prison. (RFI, 23 mars 2020 ; Jeune Afrique, 23 mars 2020)

Ghana

L’ancien président de la fédération ghanéenne de football, Kwesi Nyantakyi a été officiellement inculpé pour fraude par un tribunal de grande instance de la capitale Accra. Il est accusé d’avoir illégalement perçu 65 000 dollars afin d’accorder une faveur à un potentiel sponsor de la fédération ghanéenne de football et d’avoir demandé 12 millions de dollars pour influencer l’attribution de contrats aux sponsors. Kwesi Nyantakyi avait déjà été interdit à vie de toute activité liée au football par la justice interne de la FIFA, qui l’avait aussi condamné fin 2018 à s’acquitter d’une amende de 500 000 francs suisses (environ 440 000 euros) pour des faits de corruption. (Vox Afrique, 04 mars 2020 ; BBC, 05 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Etats-Unis

Les autorités américaines ont inculpé le 5 mars, l’ancien patron du puissant syndicat de l’automobile UAW dans une vaste enquête de corruption, qui éclabousse l’organisation depuis bientôt trois ans. Gary Jones, qui a mené les négociations salariales à l’automne ayant conduit à la plus longue grève dans l’histoire de General Motors, est accusé d’avoir détourné, avec deux autres responsables de l’UAW, plus d’un million de dollars appartenant au syndicat. (Le Figaro, 5 mars 2020) (New York Times, 5 mars 2020).

Par ailleurs, l’ancien représentant Républicain de la Californie, Duncan Hunter, qui a plaidé coupable à une accusation de fraude au financement des campagnes électorales, a été condamné le 17 mars à 11 mois de prison fédérale dans une affaire de corruption qui a mis fin à sa carrière politique. Après avoir purgé sa peine de 11 mois derrière les barreaux, Hunter doit rester en liberté sous surveillance – l’équivalent fédéral de la probation – pendant trois ans, a jugé le juge de district américain Thomas Whelan à San Diego. Hunter a plaidé coupable en décembre pour un seul chef de complot en vue de convertir les fonds de la campagne à un usage personnel, un crime passible d’une peine maximale de cinq ans de prison. En vertu de son plaidoyer de culpabilité, le bureau du procureur américain avait demandé une peine de prison de 14 mois. (Reuters, 17 mars 2020)

Mexique

Le Mexique a demandé le 24 mars à l’Espagne l’extradition d’Emilio Lozoya, ancien patron du groupe pétrolier public mexicain Pemex, soupçonné de corruption dans l’affaire Odebrecht. Emilio Lozoya, très proche collaborateur de l’ancien président mexicain Enrique Peña Nieto (2012-2018), a été arrêté le 12 février à Malaga (sud de l’Espagne) en vertu d’un mandat d’arrêt émis par la justice mexicaine en juillet 2019. Il avait démissionné en 2016 de Pemex, la plus grande entreprise publique du Mexique sujette à de graves problèmes financiers. Il est en premier lieu accusé d’avoir reçu plusieurs millions de dollars du géant brésilien du BTP Odebrecht, qui a reconnu avoir versé des pots-de-vin à de nombreux dirigeants politiques latino-américains. Ces fonds auraient été destinés à la campagne présidentielle de l’ex-président mexicain. M. Lozoya est également accusé d’avoir autorisé, lorsqu’il était directeur de Pemex, l’achat d’une usine d’engrais pour environ 500 millions de dollars, un prix excessif compte tenu du mauvais état des installations. (Le Figaro, 25 mars 2020)  (Mediapart, 25 mars 2020)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Mars 2020

Ouzbékistan

Déjà condamnée en 2017 à dix ans de prison, Goulnara Karimova, fille aînée du premier et très autoritaire président de l’Ouzbékistan Islam Karimov, décédé en 2016, a été condamnée le 18 mars par le tribunal de Tachkent à treize ans et quatre mois de réclusion pour association de malfaiteurs, fraude, détournement d’argent public et recel de devises étrangères, sans compter un château en France, des villas, des maisons, des bijoux et autres objets de luxe. Agée de 47 ans, celle qui fut longtemps surnommée “la Princesse de l’Ouzbékistan” ou la “lionne mondaine” a été créatrice de mode, ambassadrice de l’Ouzbékistan auprès de l’Organisation des nations unies à Genève, femme d’affaires ayant la haute main sur une partie de l’économie du pays. (OCCRP, 19 mars 2020 ;  Courrier International, 19 mars 2020)

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