La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

Le 9 décembre avait lieu la journée internationale anti-corruption, l’occasion pour le secrétaire général de l’ONU de souligner l’impulsion politique décisive d’une jeunesse réclamant plus de justice et de responsabilité de la part des décideurs politiques. Si l’organisation de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies (UNGASS) contre la corruption, qui aura lieu à New York en 2021, est le signe que la prévention de la corruption est au cœur de l’agenda politique mondial, les actions concrètes et les choix politiques des acteurs sur le terrain sont seuls à même de transformer ces ambitions en réalités quotidiennes.

En Corée du sud, la création d’une agence chargée d’enquêter sur la corruption des hauts responsables publics, malgré la résistance des groupes conservateurs, montre comment des promesses de lutte contre la corruption peuvent se concrétiser, et ce même dans un climat de défiance généralisée. De même, la volonté de renouvellement politique exprimée par les Algériens ces derniers mois, qui réclamaient un changement de système, trouve un encouragement dans la condamnation historique de deux ex-premiers ministres pour corruption. À l’inverse, les soupçons de détournement de fonds publics qui pèsent sur Flavio Bolsonaro, fils du chef de l’Etat brésilien, viennent remettre en question les promesses d’un candidat qui avait fait de la lutte contre la corruption une priorité. Les divers contextes nationaux nous rappellent sans cesse la nécessité d’une intériorisation des normes d’intégrité dans les systèmes politiques, au-delà de la simple condamnation de faits de corruption isolés.

ORGANISATIONS INTERNATIONALES

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

L’Irlandaise Emily O’Reilly, médiatrice européenne depuis 2013, a été réélue pour cinq ans, mercredi 18 décembre, par le Parlement européen réuni en session plénière à Strasbourg, à une courte majorité de 320 votes sur 600. Il aura fallu trois tours pour qu’une majorité se distingue face à sa concurrente principale, Julia Laffranque, juge estonienne à la Cour européenne des droits de l’homme. (Le Monde, 19 décembre 2019) (Europarl, 18 décembre 2019)

L’entreprise Atos, pilotée encore récemment par le commissaire au Marché intérieur Thierry Breton, a revu a posteriori ses dépenses de lobbying à la hausse pour 2018 sur le registre de transparence européen. Après correction, un montant d’environ un million d’euros est désormais affiché sur la notice de l’entreprise, soit 18 fois plus que la déclaration d’origine. Les erreurs ou incohérences dans le registre officiel de transparence de l’UE, censé recenser l’activité des près de 12 000 lobbies enregistrés et œuvrant à Bruxelles, sont nombreuses. En cause, des négligences, des erreurs de calcul, mais aussi certaines entreprises qui revoient à la baisse les chiffres pour préserver leur image. Contexte pointe le manque de moyens humains pour effectuer un contrôle substantiel des déclarations remplies par les lobbyistes ainsi que le manque de sanctions et le caractère facultatif des déclarations. (Contexte, 10 décembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

Le degré de conformité de la Pologne avec les recommandations du Groupe d’États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe a été jugé « globalement insatisfaisant », d’après une évaluation de suivi publiée le 16 décembre sur la corruption des parlementaires, des juges et des procureurs. La Pologne a mis en œuvre sept recommandations sur seize et une seule des six recommandations adressées dans le cadre d’une procédure « ad hoc » plus récente portant sur des réformes judiciaires (2016-2018) qui ont fait l’objet de vives critiques. La Commission européenne a par exemple engagé une procédure disciplinaire contre Varsovie. Compte tenu du très faible niveau général de conformité avec les recommandations, le GRECO demande au chef de la délégation polonaise de fournir un rapport sur l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations en suspens, avant fin 2020. (Conseil de l’Europe, 16 décembre 2019) (Council of Europe, 16 décembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

Du 10 au 12 décembre, se tenait à Stockholm, en Suède, la 19ème conférence annuelle du réseau des partenaires européens contre la corruption (EPAC/EACN). Créé en 2001, ce réseau réunit de façon informelle des autorités de lutte contre la corruption et des organismes de contrôle des forces de police des Etats membres de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe. Plus d’une centaine de participants étaient rassemblés sous le thème « Comprendre les mécanismes de la corruption, défis mondiaux et mesures préventives ».

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

La huitième Conférence des États parties (COSP) à la Convention des Nations Unies contre la corruption (UNCAC) s’est tenue à Abou Dabi du 16 au 20 décembre 2019. La COSP est le principal organe directeur de la Convention contre la corruption qui constitue, avec ses 186 signataires, le seul instrument universel anti-corruption juridiquement contraignant. Quinze résolutions ont été adoptées au cours de la semaine, portant sur les travaux des organes de lutte contre la corruption et d’audit, des services de renseignement financier et des parlements, ainsi que sur des questions telles que l’intégrité du secteur public, la sensibilisation du public, la prévention, la criminalité environnementale et la corruption dans le sport. La neuvième session doit avoir lieu en 2021 en Égypte. (ONUDC, 20 décembre 2019)

ZONES GEOGRAPHIQUES

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

SOUDAN

Accusé de corruption, l’ex-président soudanais Omar Al-Bachir a été condamné le 14 décembre à deux ans de « résidence surveillée ». Dans ce procès concernant des fonds perçus de l’Arabie saoudite, l’ancien chef d’Etat encourait jusqu’à dix ans de prison. Si l’ex-président a reconnu avoir perçu 90 millions de dollars de la part de dirigeants saoudiens, le procès ne concerne que 25 millions de dollars reçus, peu avant sa chute, du prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman. Les autorités ont saisi au domicile de l’ancien chef d’Etat plus de 7 millions d’euros. C’est la première décision de justice concernant Omar Al-Bachir, qui doit surtout être jugé pour « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité » et « génocide » au Darfour. (Le Monde, 14 décembre 2019) (BBC, 14 décembre 2019)

ZIMBABWE

Marry Mubaiwa, l’épouse du vice-président du Zimbabwe, Constantino Chiwenga, a été arrêtée le 14 décembre dans le cadre d’une enquête pour fraude et blanchiment d’argent d’un montant estimé à un million de dollars. Selon un document de la Commission anticorruption, Marry Mubaiwa est accusée d’avoir transféré en 2018 et 2019 de l’argent de ses comptes du Zimbabwe vers des banques sud-africaines « en cachant ou en maquillant leur véritable utilisation », en violation du contrôle des changes. Ces fonds auraient été utilisés pour l’achat en Afrique du Sud, avec des complices, d’une propriété dans la capitale Pretoria et de deux véhicules tout-terrain de luxe. (Jeune Afrique, 15 décembre 2019) (Al Jazeera, 15 Décembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

ALGERIE

Deux ex-premiers ministres algériens ont été condamnés pour corruption le mardi 10 décembre. Ahmed Ouyahia, 67 ans, quatre fois premier ministre entre 1995 et 2019, dont trois fois durant les 20 ans de présidence Bouteflika, et Abdelmalek Sellal, 71 ans, qui a dirigé le gouvernement de 2014 à 2017 et quatre campagnes électorales d’Abdelaziz Bouteflika, ont été condamnés respectivement à 15 et 12 ans de prison pour corruption. Ils étaient poursuivis avec d’autres anciens hauts dirigeants politiques et des grands patrons pour une série de malversations touchant le secteur automobile et le financement électoral «occulte» d’Abdelaziz Bouteflika, contraint en avril à la démission par un mouvement de contestation populaire inédit. Le procès est qualifié d’historique car c’est la première fois depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962 que sont jugés d’anciens chefs de gouvernement. (Le Figaro, 10 décembre 2019) (Al Jazeera, 20 décembre 2019)

SYRIE

Du 9 au 17 décembre, s’est tenu à Paris le procès contre Rifaat al-Assad, frère de Hafez al-Assad et oncle de l’actuel dirigeant syrien. Ce procès des biens mal acquis a été initié par l’association Sherpa dans le cadre de sa lutte contre la criminalité financière transnationale et la corruption. Il met en accusation pour la première fois dans l’histoire un membre du clan Assad qui gouverne la Syrie d’une main de fer depuis plus de quarante ans. Rifaat al-Assad, ancien cacique du régime de Damas, se serait frauduleusement bâti un patrimoine en France de près de 90 millions d’euros en blanchissant les millions issus de détournements de fonds publics qui auraient été réalisés au moment de son exil de Syrie en 1984. Le Parquet national financier a requis quatre ans de prison, 10 millions d’euros d’amende et la confiscation des biens saisis au cours de l’enquête. (Libération, 30 décembre 2019) (BBC, 9 décembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

BRESIL

Au Brésil, le fils du chef de l’Etat, Flavio Bolsonaro, est soupçonné par la justice de détournements de fonds publics et de blanchiment d’argent, durant la période où il était député de l’Etat de Rio, entre 2003 et 2018. Dans le cadre de cette vaste enquête, 24 perquisitions ont été effectuées le 18 décembre chez des proches de la famille Bolsonaro, dont Ana Cristina Siqueira Valle, ancienne épouse de Jair Bolsonaro. L’enquête se focalise aujourd’hui sur Fabricio Queiroz, ex-assistant parlementaire de Flavio, désigné comme le pivot d’un système « rachadinha » : une pratique aussi illégale que courante, consistant pour un élu à détourner à son profit le salaire d’employés de son cabinet, souvent fantômes, rémunérés par de l’argent public. Selon le parquet, des dépôts suspects, en espèces, auraient été effectués sur le compte de Queiroz, pour un montant final de près de 450 000  euros. Afin de blanchir ces « rachadinhas », Flavio Bolsonaro aurait utilisé, selon la presse, le fonds de commerce de son chocolatier et effectué plusieurs transactions immobilières. (Le Monde, 20 décembre 2019) (BBC, 19 décembre 2019)

SALVADOR

L’ancien président salvadorien Elias Antonio Saca, condamné pour corruption et blanchiment d’argent, devra passer dix ans en prison et rembourser 260 millions de dollars, a annoncé le 27 décembre le procureur général du Salvador. La cour Suprême a confirmé la condamnation prononcée en septembre 2018 par un tribunal salvadorien d’Elias Antonio Saca, président de 2004 à 2009, et de six de ses proches collaborateurs, qui avaient avoué avoir détourné des centaines de millions de dollars. Les six anciens hauts responsables jugés avec M. Saca en 2018 sont condamnés à des peines allant de dix à trois ans de prison et au remboursement de sommes allant de 900 000 à 15 millions de dollars. (Le Monde, 28 décembre 2019) (The Washington Post, 26 décembre 2019)

La lettre internationale de la Haute Autorité – Décembre 2019

VIETNAM

L’ancien ministre vietnamien de l’Information et des Communications, qui était autrefois une figure importante du politburo communiste, a été condamné à la prison à vie le 28 décembre pour avoir reçu des pots-de-vin de la compagnie de télécommunications Mobifone. Il a été jugé pour avoir obtenu 3,2 millions de dollars afin qu’il donne son accord à l’achat d’une firme de télévision privée. En 2018, Dinh La Thang, le secrétaire local du parti à Hô Chi Minh-Ville, fut le premier haut responsable à être emporté par la campagne anti-corruption du gouvernement. L’opération vise, pour le moment, d’anciennes personnalités politiques majeures. Un moyen, pour le président Nguyen Phú Trọng, de consolider son pouvoir et de faire le grand ménage dans les rangs du parti unique donnant, pour beaucoup, une image de purge politique à cette campagne anti-corruption. (RFI, 28 décembre 2019) (Reuters, 28 décembre 2019)

COREE DU SUD

La Corée du Sud a voté une loi visant à créer une agence chargée d’enquêter sur la corruption des hauts responsables publics, malgré la résistance du principal parti d’opposition et des groupes conservateurs. La création d’une agence anti-corruption était la plus grande promesse de campagne  du président Moon Jae-in, dans le but de réformer le système judiciaire du pays dans un climat de défiance généralisée à l’égard des procureurs. (The Financial Times, 30 décembre 2019)

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REPUBLIQUE TCHEQUE

Le procureur général tchèque a annoncé mercredi la réouverture de l’enquête, close en septembre, sur la fraude aux subventions européennes visant le Premier ministre, le milliardaire Andrej Babis. Il est soupçonné d’avoir profité des fonds européens destinés aux PME pour créer son complexe hôtelier en 2007, quatre ans avant son entrée en politique. La police estime que M. Babis n’a séparé que provisoirement cette ferme de son groupe Agrofert pour bénéficier de ces subventions. Le parquet de Prague a lavé M. Babis et des membres de sa famille de tout soupçon en septembre, estimant que leur ferme répondait à la définition d’une PME. Selon le procureur général Pavel Zeman, « il y a eu des faiblesses dans l’évaluation de l’acte et aussi dans son évaluation juridique ». Il a précisé que l’enquête ne portait désormais que sur M. Babis et son assistante Jana Mayerova. (Le Monde, 4 décembre 2019) (The Financial Times, 4 décembre 2019)

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