La régulation du lobbying au Canada

Le lobbying à l'international PUBLIÉ LE 24 juin 2021

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a publié en octobre 2020 une étude comparative des dispositifs d’encadrement du lobbying à travers le monde. Y figurent les membres du Réseau des registres européens du lobbying, à savoir l’Autriche, la Catalogne, l’Écosse, la France, l’Irlande, la Lituanie, le Royaume-Uni, la Slovénie et l’Union européenne, ainsi que des pays qui font état de bonnes pratiques en la matière. Focus sur le dispositif d’encadrement du lobbying mis en place au Canada.


Quel dispositif de régulation du lobbying existe au Canada ?

Au Canada, le lobbying est encadré au niveau fédéral depuis 1989. Le Commissariat au lobbying assure la mise en œuvre de la Loi sur le lobbying et le Code de déontologie des lobbyistes. Il tient un registre public en ligne des informations déclarées par les lobbyistes, sensibilise les parties prenantes et vérifie la conformité des lobbyistes à leurs obligations.

Le commissaire au lobbying est nommé par les deux chambres du Parlement pour un mandat de sept ans. Madame Nancy Bélanger occupe actuellement le poste depuis le 30 décembre 2017. Le Commissariat compte 28 employés à temps plein et un budget global d’environ 4 millions CAD.

Quelle est la définition d’une activité de lobbying ?

Toute communication à propos d’un sujet énuméré aux articles 5(1)(a) et 7(1)(a) de la Loi sur le lobbying ou toute demande d’entrevue par un lobbyiste-conseil avec une personne « titulaire d’une charge publique » au sujet de certaines politiques publiques est considérée comme une activité de lobbying. La personne à l’initiative de la communication doit être rémunérée par un client ou un employeur.

Les titulaires d’une charge publique incluent notamment presque tous les fonctionnaires fédéraux, les parlementaires et leur personnel, ainsi que les membres du gouvernement fédéral. Les sujets concernés sont, par exemple, l’élaboration de toute proposition législative, la modification d’un projet de loi, d’un règlement, ou d’une politique publique, ou bien encore l’octroi d’une subvention.

Qui est considéré comme lobbyiste ?

Le Canada distingue les « lobbyistes-conseils », qui moyennant paiement effectuent du lobbying au nom d’un client (un particulier, une entreprise ou une organisation), et les « lobbyistes salariés » qui sont employés d’entreprise ou d’organisation et qui s’occupent du lobbying dans le cadre de leur fonction.

Le seuil pour l’enregistrement des lobbyistes salariés est atteint si collectivement les activités de lobbying sont équivalentes à 20% d’un employé à temps plein.

 



Quelles informations les lobbyistes doivent-ils déclarer et à quelle fréquence ?

Lors de leur inscription au registre, les lobbyistes doivent déclarer certaines informations sur leur entreprise ou client. Pour les lobbyistes salariés, seul le dirigeant de l’entité exerçant les activités de lobbying doit s’inscrire au registre et déclarer les activités de lobbying de ses lobbyistes salariés. Les lobbyistes doivent déclarer le titre et une description des propositions législatives, projets de loi, règlements, politiques et programmes visés ; subventions et/ou contributions recherchées ; les institutions fédérales avec lesquelles ils communiquent ; et les techniques de communication utilisées ou prévues. Ces informations doivent être mises à jour en cas de changement et au plus tard tous les six mois.

De plus, en cas de communication orale, organisée avec un responsable public de haut niveau (listé dans la loi), à l’initiative du lobbyiste, ou de communication à l’initiative d’un responsable public portant sur l’octroi de subvention, de contribution ou d’avantage financier, les lobbyistes doivent soumettre un rapport pour chaque communication. Ce rapport mentionne la date de la communication, l’objet de la communication, et pour chaque titulaire d’une charge publique désignée visée, fournir le nom de famille et prénom, le titre du poste, la direction ou service et l’institution dans laquelle le titulaire travaille.

Les lobbyistes sont-ils soumis à des obligations déontologiques ?

Oui, il existe un Code de déontologie des lobbyistes, entré en vigueur en 1997 et revu en 2015. Ce code établit des normes de conduite obligatoires pour les personnes qui doivent s’inscrire au registre du lobbying.

Les principes du respect des institutions démocratiques, de l’intégrité et de l’honnêteté, de l’ouverture et du professionnalisme sont présentés comme des objectifs que les lobbyistes devraient chercher à atteindre.

Les principes sont suivis d’une série de dix règles qui imposent aux lobbyistes des obligations et exigences précises. Les règles sont réparties en trois catégories : transparence, utilisation de l’information et conflits d’intérêts. Par exemple, il est interdit aux lobbyistes de placer des titulaires d’une charge publique en situation de conflit d’intérêts réel ou apparent. Des règles précises offrent une orientation aux lobbyistes dans les domaines de l’accès préférentiel, des activités politiques et des cadeaux.

Quelles sont les sanctions en cas de manquements aux obligations prévues par la loi ?

La Loi sur le lobbying prévoit des pénalités pour les lobbyistes qui auraient omis de s’enregistrer ou déclaré des informations fausses ou trompeuses. Ils encourent :

– « par procédure sommaire », une amende maximale de 50 000 CAD et un emprisonnement maximal de six mois, ou l’une de ces peines ;

– « par mise en accusation », une amende maximale de 200 000 CAD et un emprisonnement maximal de deux ans, ou l’une de ces peines.

Une interdiction d’exercer du lobbying pendant deux ans peut également être prononcée.

La commissaire a le pouvoir discrétionnaire de mener une enquête lorsqu’elle a des raisons de croire à un manquement au Code de déontologie des lobbyistes. Les enquêtes du Commissariat au Lobbying peuvent être suivies d’un rapport au Parlement rendu public.

De quels moyens de contrôle dispose le Commissariat au lobbying ?

Le Commissariat mène diverses activités de surveillance de la conformité des lobbyistes à leurs obligations. Avant de commencer une enquête, la commissaire procède à une évaluation préliminaire pour déterminer si la question relève de son mandat et de sa compétence, et  si une enquête est nécessaire pour assurer la conformité.

Au cours d’une enquête, la commissaire a le pouvoir d’assigner toute personne à se présenter et à produire des documents, et de recevoir toute preuve verbale ou écrite sous serment.

Si une infraction a été commise, la commissaire doit suspendre l’enquête et renvoyer l’affaire à un agent de la paix (par exemple, à la Gendarmerie royale canadienne ou aux services de police provinciaux/territoriaux).

Si le renvoi n’aboutit pas à une accusation ou à une condamnation, la commissaire peut décider de mettre fin à l’enquête ou la poursuivre et faire un rapport au Parlement.

La Commissaire au lobbying a rendu 16 rapports d’enquête depuis 2011. Quatre lobbyistes ont fait l’objet d’une interdiction d’exercer des activités de lobbying depuis 2016. Leur identité est publiée en ligne.

Existe-t-il des interdictions d’exercer des activités de lobbying pour les titulaires de charge publique après la fin de leur mandat ?

Oui, les titulaires d’une charge publique désignée ne peuvent exercer des activités de lobbying en tant que lobbyiste-conseil ou lobbyiste salarié employé par une organisation pendant cinq ans après la fin de leur mandat, quel que soit le domaine ou le secteur envisagé. La commissaire peut prononcer une exemption de cette interdiction quinquennale au cas par cas, assortie ou non de conditions. L’identité des personnes bénéficiant de telles exemptions sont publiées en ligne. Selon la loi, un ancien titulaire désigné qui est employé par une entreprise (personne morale) peut faire des activités de lobbying au nom de son employeur si ces activités ne constituent pas une part importante de ses fonctions (20% ou plus au niveau de l’individu).

Quelles sont les pistes d’amélioration du dispositif canadien ?

La commissaire au lobbying a présenté en février 2021 des recommandations au Parlement canadien pour améliorer la Loi sur le lobbying. Ces dix recommandations visent à améliorer les principes de clarté, de transparence, d’équité et d’efficacité du dispositif canadien.

Parmi les recommandations figurent la suppression du seuil d’activité nécessaire à l’enregistrement des lobbyistes salariés, l’harmonisation des contenus déclarés par les lobbyistes, l’extension des obligations de rapport pour toute communication orale avec les titulaires d’une charge publique ou encore des obligations de formation pour les lobbyistes. De plus, la commissaire au lobbying recommande qu’un pouvoir de sanctions administratives pécuniaires lui soit attribué, afin de disposer d’un arsenal de mesures plus flexible et proportionné.



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